La passeuse de plantes

Récit imaginé par Cath et facilité par Sophie dans le cadre de l’atelier futurs proches réalisé le 22 juin 2023 en collaboration avec l’assemblée des imaginaires

Thème de l’atelier :  A quoi rêvons-nous pour demain ?

 Depuis toute petite, elle parcourait les chemins avec sa grand-mère. Elle connaissait par cœur tous les puys, ces anciens volcans qui offraient maintenant leurs étendues verdoyantes. Elle aimait la douceur de ces montagnes rondes, avec ce cœur au sommet, comme une coupe qui s’ouvre au ciel. Elle aimait se relier à la puissance de feu au cœur de la terre qui avait, il y a longtemps, craché ses flammes et créé ces formes maintenant refroidies et assagies. 

Elle avait appris les plantes comme on apprend à marcher, comme on apprend à parler. Elle les connaissait chacune par leur nom, leur odeur, leur couleur, leur texture. Elle aimait les redécouvrir à chaque saison, d’abord toute jeune pousse, puis quand elle se déploient, et quand les fleurs sont là, puis les fruits. Elle savait quand les utiliser, celles qui se mangent et celles dont il faut se méfier, celles qui soulagent, celles qui soignent. 

Elle avait maintenant 12 ans. Elle partait souvent pour de longues ballades, seule. C’était des moments divins : le silence, la nature, l’infini autour d’elle. 

Quelque chose avait changé au printemps. Cela avait commencé par les premières primevères. Elle s’était arrêtée pour les contempler, et là pendant quelques instants, elle avait comme disparu à elle même et était devenue primevère. Un moment fugace. Elle s’était demandé si elle n’avait pas rêvé. Puis ça c’était reproduit, de plus en plus souvent. C’était devenu régulier. Elle communiait avec les plantes. 

Après une période, où troublée, elle hésitait presque à retourner sur les chemins, elle s’en ouvrit à sa grand-mère. Celle ci ne parut pas étonnée. « C’est ton talent ma chérie. Tu as reçu ce don d’être une passeuse, de parler le langage des plantes et celui des humains. »

Rassurée, elle s’était autorisée à le découvrir pleinement. Non seulement, elle vivait ce lien avec la plante, mais aussi toute personne qui lui donnait la main à ce moment là, pouvait elle-même capter la connaissance de cette plante. Au début, c’étaient les enfants, -les plus jeunes, qui ne se posent pas de questions et prennent le cœur ouvert ce que la vie leur offre- qui venaient avec elle en balade, fascinés par ces instants magiques, puis les plus grands eurent envie d’en profiter eux aussi. Puis des adultes, intrigués par ce que leurs enfants leur apprenaient, vinrent aussi se promener et rencontrer les plantes avec elle. 

Grâce à elle, tout le village redécouvrit très rapidement la connaissance des plantes sauvages, pour se nourrir et pour se soigner.