Seules les montagnes ne se rencontrent pas

Récit imaginé par Gabrielle Manfre, Nina Geron et Thierry Michelland et facilité par Vanessa Weck dans le cadre l’atelier futurs proches réalisé le 14 octobre 2021 en partenariat avec Génération Ecologie)

Thème de l’atelier:  Nous sommes le 3 novembre 2026. Depuis bientôt 5 ans, la France mène une politique décroissante planifiée, volontaire et salutaire. Et si nous imaginons le quotidien de citoyen.ne.s dans ce futur proche ? 


Delphine, la tête appuyée contre la vitre du bus, songeait à sa condition d’élève ingénieure en fin de cycle. Que faire avec ce diplôme d’un autre monde en poche. Elle était censée connaitre tout sur tout et en fait elle ressentait comme une ignorance immense, un vide vertigineux face aux enjeux de société que sa génération devait affronter pour vivre dans un monde meilleur ou du moins pour éviter une catastrophe humaine. Elle trouvait injuste de vivre cette conscience du risque, à son âge, avec une question lancinante : par quoi commencer ?   Sa jeune sœur Gabrielle qu’elle accompagnait la tira de ses pensées. Elle lui parla du projet qu’elle devait étudier en assemblée citoyenne communale dans la banlieue Rennaise. Ces assemblées communales étaient une création du nouveau gouvernement, pour bâtir une société plus responsable de son destin, plus participative. C’est un conseil municipal hebdomadaire élargit à des citoyens non élus de 16 à 77 ans volontaires et provenant de divers milieux . Le protocole de travail est assez rigoureux, animés par des médiateurs expérimentés et formés.  Chaque projet important pour la commune ou un quartier y est instruit, débattu pour donner lieu à une information complète de la population  avant soumission à referendum. Le conseil d’élu n’applique que ce qui a était voté à l’unanimité.

Une fois arrivée à la mairie où se réunit l’assemblée, elles prennent connaissance de l’ordre du jour du 16 novembre 2026 qui porte sur l’aménagement du quartier XX. Deux options sont présentées : la création d’un centre accueil pour personnes âgées, infrastructure manquante à plusieurs kilomètres à la ronde et l’aménagement d’un jardin partagé pour répondre aux besoins alimentaires de la commune. 

On est à la phase une de ce projet l’idée est soumise par le conseil municipale élu qui répond à un besoin général. Le débat s’engage calmement et la tendance générale va  vers le choix de la construction du centre d’accueil.

Au bout de plusieurs minutes, Gabrielle qui a participé à la création d’un jardin partagé prend son tour de parole : « Mais pourquoi ? ça ne fait pas sens de construire, du neuf dans ce quartier typique ou va-t-on mettre les arbres centenaires de cette place si fréquentée en été ? La place de la nature est importante ! Et c’est indispensable de se nourrir ! » Alors oui pour exploiter intelligemment les surfaces de pelouses et en faire un magnifique jardin potager ouvert à tous. Delphine qui ne faisait qu’accompagner demande la parole, qu’on lui accorde volontiers. Elle se présente et puis soumet son idée. « Pour ce qui est de la maison pour personnes âgées il doit bien y avoir des bâtiments exploitables en centre-ville que l’on pourrait aménager, c’est une idée que je lance pour réflexion. On pourrait faire d’une pierre 2 coups. Un jardin partagé assez peu couteux à mettre en place, avec le concours de volontaires, comme nous savons le faire déjà dans cette ville. Pour ce qui est du bâtiment à aménager avec tous les bâtiments commerciaux libérés du centre villes on devrait pouvoir disposée une surface suffisante pour y créer une résidence sympathique ou se mélangerait autour de nos anciens des générations plus jeunes.

Après un long silence de questionnement individuel La séance est levée, Gabrielle sort en furie, sur le chemin du retour, Delphine, d’un tempérament plus posé et réfléchi lui suggère d’en parler avec ses grands-parents, concernés par ces dispositifs. Une fois rentrée, Gabrielle, Delphine, Anne-Marie et Bernard se retrouvent pour diner. La discussion s’engage sur l’incompatibilité des deux projets puis sur ce que voudraient les grands parents pour vieillir « bien ».
Pour rendre la proposition crédible, il faut pouvoir la présenter concrètement à la prochaine assemblée citoyenne. Anne-Marie repense alors à une ancienne amie propriétaire d’un ancien centre commercial de centre-ville inutilisé depuis plusieurs années. C’est sans aucune difficulté qu’Anne-Marie appelle son amie et la convainc de les accompagner à la prochaine assemblée citoyenne pour porter cette proposition.

Le lundi 23 novembre 2026, Gabrielle, Delphine, Anne-Marie et son amie arrivent ensemble à la mairie et présentent le projet. La solution est validée par l’ensemble des participants et ensuite par referendum.

Le lieu de vie intergénérationnel verra le jour le 23 novembre 2027, plus rapidement que l’érection d’un bâtiment neuf. Le bâtiment récupéré par la commune était déjà équipé pour recevoir des personnes à mobilité réduite et sa surface conséquente aura permis d’équiper 30 logements individuels repartis sur les 3 plateformes qu’il offrait. 

De grandes parties communes sur chaque niveau permettront l’échange.  Le jardin partagé sera lancé pour la prochaine récolte. Ces deux créations permettent un lien social de production alimentaire et une entraide entre les générations, de sa conception durant sa réalisation et pendant son exploitation .