30 Mar Lettre à mon avenir
Récit imaginé par Lilya, Maxime, Clara et Emeline et facilité par Marie-Luce Storme et Thomas Gauthier dans le cadre de l’atelier futurs proches réalisé le 30 mars 2023 en partenariat avec l’ADEME
Thème de l’atelier : Et si la France était neutre en carbone en 2050 dans le scénario 2, coopérations territoriales ?
Mon cher Rayan,
Cela fait longtemps que je voulais t’écrire, mais entre le travail et les compétitions de surf, le temps me manquait, j’en suis désolé. Je reviens juste d’Hossegor, j’ai terminé 3ème de la compétition, Safae et mon petit Paolo étaient là pour m’encourager. Cette compétition m’a fait du bien, j’ai eu l’impression de revivre nos sessions de jeunesses à Bali. Ce bon vieux temps me manque, comment crois-tu que Bali est devenu ? Depuis qu’il nous est interdit de prendre l’avion, je me pose souvent la question. Je crois que le mode de vie qu’on défendait toi et moi quand on était jeunes ne me convient plus, j’ai l’impression d’être un individu parmi d’autres, je cherche ma place dans ce monde sans relief… mais j’ai décidé de me reprendre en mains, j’ai de grandes nouvelles à te partager :
Je viens de me faire licencier, me voilà sans travail. Tu sais à quel point j’ai travaillé dur et à quel point j’ai tout donné pour ce job. Pourtant, un des associés du cabinet m’a appelé cet après-midi pour m’annoncer que les tensions environnementales ne sont aujourd’hui plus suffisantes pour justifier qu’il y ait autant de collaborateurs au sein du cabinet. Il fallait faire un tri, et j’ai fini dans la poubelle jaune. Mon poste a vocation à disparaître et je ne me sens plus d’aucune utilité, mais j’essaie de relativiser.
Ce licenciement m’a permis de réaliser tellement de choses sur ce que je vivais, sur ce que j’attendais réellement de la vie. J’étais si motivé par ce projet que la France développait, d’être neutre en carbone, respectueux de notre planète et de la biodiversité, en mettant le citoyen au cœur d’une économie locale, mais la vie n’est plus la même depuis. Tout a changé. Avec Safae et Paolo nous partageons notre logement avec d’autres familles, il est de plus en plus difficile d’avoir de l’intimité. Nous ne possédons plus rien, nous avons dû tout vendre lorsque ces habitations ont été créées. Nous vivons en communauté toute la journée, j’ai l’impression que la vie n’a plus de saveur. Les discussions se ressemblent, rien ne nous permet de nous évader. Nous ne pouvons plus voyager et prendre l’avion, nos campagnes sont nos seules excursions. Ma région n’est plus ce qu’elle était, nous nous enfermons malheureusement dans notre quotidien .
Je me suis réellement investi dans ce nouveau mode de vie. J’ai apprécié de nombreuses choses : me recentrer sur les marchés locaux, sur un mode de vie plus simple, prendre mon vélo pour aller au travail et apprécier la nature. J’ai tout de même l’impression d’être limité dans mes actions et je commence à me demander si nous ne devrions pas trouver un équilibre différent et un peu plus ouvert vers l’extérieur. Sommes-nous allés trop loin ?
Je n’ai plus de travail et je commence à chercher un sens à tout cela. On a décidé de partir quelques mois pour découvrir de nouvelles cultures et de nouveaux paysages. Je pense que c’est nécessaire pour nous recentrer sur ce qu’on doit faire par la suite et réfléchir sur notre place dans la société. Cette ouverture d’esprit sur le monde m’a manqué et va nous permettre de repartir sur des bases plus saines et peut être plus permissives. Comment pouvons-nous retrouver un brin de folie dans notre quotidien ?
Raconte-moi comment tu vas et comment se passe la grossesse d’Orrore, j’ai hâte de te lire.
Ton Aymerik adoré