L’école du cercle vert

Récit imaginé par Christelle Cabasse, Lucille Riffard, Adrian Noka et Lucien et facilité par Adrien CONTY, dans le cadre de l’atelier Futurs Proches réalisé le 12 janvier 2022 à Montpellier. 

Thème de l’atelier: Et si l’économie circulaire était devenu la norme ?

Nous sommes le 20 janvier 2035 et la France a mis en place une politique incitative et contraignante sur la durée de vie des produits et services.

Le dérèglement climatique s’est encore accentué à l’échelle mondiale et les paysages français ont été transformés. Des champs d’oliviers commencent à pousser sur les territoires du Nord de la France et des nouvelles espèces commencent à pousser dans le Sud.

Face à ces constats, à la prolifération des déchets et à la surconsommation, le gouvernement a mis en place des actions pour inciter les individus et les entreprises au réemploi et au recyclage afin d’allonger la durée de vie.

Un nouveau mode de fonctionnement voit le jour avec un retour de manière de plus en plus présente du troc et de l’échange. L’argent n’est plus le levier d’échange principal entre les différentes personnes.

Pour les entreprises, des bonus/malus sont mis en place selon leur engagement sur la voie de l’économie circulaire à tous les niveaux.

La consommation de produits neufs est en chute libre et a des conséquences sur l’ensemble de l’économie mondiale.

La notion de propriété individuelle est de moins en moins présente et l’usage partagée et collectif des biens, des services et devient la norme.


Cher correspondant Québécois,

Je t’écris depuis mon école « Le Cercle Vert », située dans la campagne landaise, près de l’océan, en France.

Je m’appelle Arthur et j’ai 12 ans. j’aimerais te partager mon quotidien d’écolier ici, afin que tu fasses de même par la suite et que nous découvrions nos vies respectives.

L’école commence entre 8 h et 9 h le matin. Je peux arriver quand je le souhaite sur ce créneau, pour m’adapter en fonction de mon énergie et de mes envies. « Le Cercle Vert » est un bâtiment à énergie positive, entièrement éco-conçu. Il est très agréable et pensé pour s’adapter au rythme des saisons. Il est entouré d’un jardin-forêt, au cœur duquel on trouve un chemin qui conduit à notre petite ferme de permaculture.

Gaïa est la personne qui occupe la seule habitation de l’école. C’est elle qui veille à son intendance et à s’occuper de nos animaux. Nous avons en effet des chiens, des chats, des poules, un poney, une chèvre et des lapins. L’idée est que toutes les formes du vivant se côtoient sur ce lieu, car nous pensons qu’il faut vivre au plus près de cette biodiversité pour la comprendre et la respecter.  C’est personnellement parce que j’aime cet écosystème que j’aie envie de le défendre.

Chaque matin, il nous est demandé de former des groupes, de préférence différents de la veille pour apprendre à nous connaître et à nous apprécier. Nous pouvons choisir l’activité qui nous convient le mieux parmi les cinq proposées. Elles consistent toutes à fabriquer des objets dont nous avons réellement besoin ou à apprendre un savoir-faire ou un savoir-être. Je trouve cela formidable car lorsque chaque matinée se termine j’ai l’impression d’avoir grandi : je me sens plus confiant, épanoui, aligné et heureux.

Après le déjeuner, je devais me rendre dans le parc de l’école pour mon cours de philosophie avec le professeur Dumbeldore. Malheureusement, le cours fut supprimé pour « absence du professeur », ce qui était, très inhabituel de sa part.

Mais hier, en écoutant Gaïa discuter avec un autre professeur, j’ai appris qu’il a eu un problème familial assez important…

En rentrant chez moi, j’ai reçu un mail du professeur avec une simple vidéo…très intrigué, je l’ai ouvert et j’y ai découvert un message de notre professeur expliquant les réelles raisons de son absence. En effet, il avait planifié son départ et souhaitait nous sensibiliser à gérer « les imprévus de la vie » et l’importance du « temps »…

Incroyable !! À travers son absence, il nous a soumis à une expérience : il voulait évaluer notre capacité à nous adapter à une situation et nous a demandé de raconter, lors du prochain cours, ce que nous avons fait pendant son absence, à qui et à quoi nous avons consacré notre temps. Il voulait qu’on lui raconte… Comment nous avons utilisé notre temps au service du monde et des autres…

Dumbledore n’étant pas là, on avait 3 heures devant nous. J’ai alors proposé à mes copains David et Julia d’aller aider Roger, le maraîcher qui alimente la grande partie des habitants du coin. Le concept est génial ! On peut aller l’aider quand on le souhaite, on apprends comment s’occuper des fruits et des légumes et on repart avec quelques fruits en main. Mes parents me disent qu’on peut acheter de gros paniers pas cher grâce à ce fonctionnement. Contrairement aux fruits et légumes de leur plus jeune âge, moins gouteux, un peu douteux et très couteux. 

Roger et son équipe nous reçoivent toujours à bras ouvert ! Ils nous assignent de petite tâches. Aujourd’hui, j’ai retiré les mauvaises herbes autour des beaux plans de salade pour éviter les limaces. 

On a fait une petite pause où le frère de Roger nous a donné un de ses succulents petit gâteux sec avec du chocolat chaud, au lait végétal.. un vrai régal !

Roger me propose ensuite de donner des graines aux poissons des bassins permettant d’alimenter les récoltes environnantes grâce à l’eau de pluie. Je termine par la récupération des œufs de poules où je découvre l’arrivée de 10 petits poussins. On reste avec eux une bonne demi heure, j’en aurais bien gardé un avec moi, je n’arrivais plus à partir. Il était maintenant l’heure d’aller chercher ma sœur à l’école.

J’ai enfourché le Vélab’ (vélo collectif mis à disposition par la ville). Un dernier au revoir à Roger quand je tourne sur la voie cyclable et que je reprends la direction de Cercle Vert. J’avais encore de la terre sur les mains, mais bon je ne voulais pas trop faire attendre Margaux. Je me souviens m’être fait la réflexion que « quand même on est bien à Vélab’ ». Et oui la ville, grâce aux politiques gouvernementales, a mis en place une multitude de réseaux cyclables pour se rendre dans les points stratégiques du village et de ses alentours. Tu devrais voir ça ! On voit même des ronds-points uniquement pour vélo maintenant.

L’école était à quelques coups de pédales que déjà je distinguais la classe de Margaux sortir. Une fois arrivé devant, j’ai à peine eu le temps de poser pied à terre qu’elle me rejoignait déjà à Vélab’.

Sur le trajet de la maison, elle m’a raconté sa journée. Le programme a évolué, ils ont déjà le cours sur l’économie des ressources naturelles. J’adore toujours autant rentrer avec elle. Traverser mon village me donne souvent envie de m’arrêter au CoffeeShare, qui est sur le trajet de la maison. Je me rappelle encore y aller à son ouverture quand j’avais 5 ans…  C’est un lieu formidable qui rassemble toutes sortes d’objets de la maison et du jardin pour être partagé. Avant ces objets étaient privés et réservés à l’unique utilisation de son propriétaire, c’est assez Old-School quand on y repense. Alors que maintenant, j’y vais avec Margaux pour y faire une lessive quand maman nous le demande. La ferme de Roger est d’ailleurs un de leurs fournisseurs, c’est toujours un régal de prendre un verre là-bas en attendant la fin de la machine.

Trêve de rêverie, on a donc fini par arriver chez moi. Il ne restait plus qu’à reposer les Vélab’ aux bornes d’à côté et ma journée presque normale pouvait se terminer pour moi. 

Hâte d’avoir de tes nouvelles en retour ! 

Arthur