Le goût de vivre

Récit imaginé par Chloé MATISSE (La Ligne Vertuose) et Nicolas GAUTHY, et facilité par Aude CASIER dans le cadre de l’atelier proposé par Futurs proches et la CRESS Auvergne Rhône Alpes, réalisé le 18/01/2022.

Thème de l’atelier :  Nous sommes en 2027, depuis 5 ans la France vit, bon an mal an, en « République de l’économie sociale et solidaire » grâce au travail de plaidoyer qui avait été fait par le mouvement de l’ESS lors de la campagne présidentielle de 2021-2022  


Un certain nombre de mesures fortes ont été prises ces 5 dernières années, notamment celle-ci : désormais, tous les citoyens, quelles que soient leurs ressources, ont accès à une alimentation saine provenant de circuits courts (type AMAP).

La République sociale et solidaire a été mise en place en 2022, et, 5 ans après, Jean-Paul, n’en peut plus de cette pression du « consommer local et sain ». Milo son petit-fils est quant à lui un fervent défenseur de la consommation locale, au sein d’un groupe de lycéens, les Grinz.

Un matin plus gris que les autres, Jean-Paul craque et prend le tournant du dark net. Il y achète les produits dont il a envie, en particulier … le chocolat ! A la réception de cette marchandise illégale, il est obligé de tout cacher car il sait que son petit-fils, et aussi Monique, sa femme, sont partisans de la production locale. C’est également en se baladant sur les réseaux sociaux qu’il découvre le groupement des Pro-Nut, favorable à la re-globalisation de l’alimentation. Il se fait alors embringuader dans cette communauté et commence à participer à des manifestations à leurs côtés.

Peu après, Milo tombe sur un pot de pâte à tartiner à l’huile de palme dans un tiroir du bureau de Jean-Paul. Cette trouvaille commence à éveiller chez lui des soupçons sur son grand-père, qu’il adore pourtant. Sur Facebook, il constate que celui-ci relaie des messages d’une certaine communauté … les Pro-Nut, avec lesquels les Grinz sont régulièrement en conflit ! Leur credo : « c’était mieux avant » ou encore « il n’y a pas de mal à se faire du bien »…

Quelques jours plus tard, les Grinz l’invitent à une contre-manif. Il s’agit de s’opposer à un groupe réactionnaire qui milite pour le retour des tomates en janvier et la liberté de manger du guacamole fait avec des avocats du Pérou. Les deux groupes en viennent aux mains, à coups de bouses de vache et de bouteilles de Cola. C’est là que dans la pagaille générale, Milo aperçoit Jean-Paul dans le camp opposé. Après cette friction, les deux ne veulent plus se parler. Milo refuse même de venir aux fêtes de fin d’année. Il ne viendra que si le foie gras est retiré du menu.

La grand-mère de Milo est peinée de la situation.  Elle propose à Jean-Paul de l’accompagner au marché place de Paris (Lyon 9). Ils n’y sont pas allés depuis longtemps. La place est méconnaissable. À tous les coins de rue, on voit des artisans, des producteurs, des commerçants indépendants qui discutent, échangent, apprennent… Jean-Paul ne veut pas le montrer à sa femme, mais il passe un bon moment. Pour donner le change, il grommelle un peu en ironisant sur les poireaux et les navets de saison. Pourtant, au fond de lui, il se souvient qu’avant ces grands changements, tout le monde n’avait pas accès à une alimentation saine, provenant de circuits courts. Ni même parfois à l’alimentation tout court. Alors il sourit et demande à Monique s’ils ne pourraient pas appeler Milo pour qu’il les rejoigne.

C’est ainsi qu’en déambulant à travers le marché, Milo et Jean-Paul échangent sur la convivialité et le partage créés grâce aux circuits courts. Milo montre le bien-fondé de la république ESS à son grand-père et il lui propose alors de venir participer au projet de maraîchage dans son lycée. Il apprend ainsi à son grand-père à jardiner, mais surtout, il lui fait découvrir une autre forme de plaisir : le goût de vivre.

Tags: