Clashtique

Récit imaginé par Emilie Arras, Constantin et Olivier Gonfrier et facilité par Hélène Merlin et Alexis Louat dans le cadre l’atelier futurs proches réalisé le 06 juillet 2022 en partenariat avec Plastic Odyssey.

Thème de l’atelier:  Et si en 2038, la France apprenait à vivre sans plastique ? 


« Encore eux ! », souffla Pierre dans son bureau. Accompagné de son cortège de directeurs, le moment est venu de faire un point sur la situation. En effet, l’usine est assiégée depuis 6h ce matin et les ouvriers n’ont pas pu accéder à leurs postes. Les Zadistes ont pris le dessus en bloquant la porte principale, et la production est à l’arrêt. Chaque minute passée avec ces machines arrêtées est coûteuse. Et c’est tous les mois le même cirque. Produire des bouteilles en bioplastique, voilà ce que le gouvernement lui a vendu. La société a pu changer sa ligne de production grâce aux subventions européennes, mais cela nécessite plus de terres. Depuis plusieurs mois, l’usine de Pierre tente de récupérer les terres occupées par la Zad. La confrontation ne cesse depuis.  « Je vais descendre afin d’éclaircir cette situation, marre de voir ces jeunes loulou saccager mon travail tous les mois ! ». 

Arrivé en bas, Pierre tombe sur la presse. Il se dirige vers la journaliste qu’il connaît. Elle vient, elle aussi, à chaque rendez-vous.

Emilie
Mercredi 6h du matin, réveillée par Marie, j’apprends que Maxime, Alex et les autres sont allés bloquer l’usine d’à côté. Cette usine appartient à Pierre, le PDG, qui n’est autre que le père d’une amie de mon école d’ingénieur. Je décide de me rendre sur place pour amorcer le dialogue avec Pierre. En arrivant j’aperçois de loin un journaliste qui interview un homme très en colère. En m’approchant, je reconnais Pierre. 

« – Bonjour, je suis Sarah, une amie de votre fille Hélène,
– Et vous voulez quoi en fait  ? 
– Extinction Rébellion, ça ne vous dit rien ? 
– Non. 
– Ça veut dire que vous êtes en train de nous faire crever avec votre business qui ne bouge pas. Depuis 50 ans on vous dit que ce n’est pas viable. 
– On le change le business, je produis du plastique avec du maïs. Et ce n’est pas que pour moi tout ça. J’ai 56 employés qui font tourner l’usine. Y a plus de 200 personnes qui vivent de ce qu’on fait ici. »

Comment faire pour sortir de cette confrontation ? C’est bien de s’opposer, d’être contre mais quelles sont les solutions ? Le gigantisme dans tous les cas c’est terminé. Les humains exploitent deux fois ce que peut produire la Terre, on a vu le résultat. Y a plus de charbon, y a plus de pétrole, bientôt plus de bois. En même temps faut bien vivre. Ce que Pierre finit par proposer à Sarah, c’est de lui présenter des projets puisqu’elle est si maline. Des projets à petite échelle, qui tiennent compte du fait que le monde est fini. Il est OK sur le principe si ça lui rapporte un peu. Sarah hésite « est-ce qu’elle a vraiment envie de travailler avec un mec comme ça ? De soutenir un tel système ? Ils vont penser quoi dans la communauté ? ». Elle va leur en parler mais ça la tente quand même. Faut dire que c’est aussi la galère de tout construire à la main. Ça leur servirait bien de pouvoir utiliser certaines des grosses machines qu’elle a vu en montant. En se laissant un peu aller, y a plein d’idées qui lui viennent en tête. Elle se laisse aller à rêver de Montgolfière comme dans les livres de Jules Vernes et d’architectures Art nouveau comme dans ses albums de BD Solar Punk. L’idée n’est pas si mauvaise d’utiliser enfin ces outils de production pour construire des choses belles, dont les gens ont vraiment besoin. Ça ne lui enlèvera pas la rage au ventre mais ça lui permettra peut-être de s’en servir pour de nouveau s’émerveiller…