Adieux humides à la croissance

Récit imaginé par Gildas Daniel, .Julien Lecaille, Adrien et facilité par Fiona Gamer dans le cadre l’atelier futurs proches réalisé le 14 octobre 2021 en partenariat avec Génération Ecologie.

Thème de l’atelier:  Nous sommes le 3 novembre 2026. Depuis bientôt 5 ans, la France mène une politique décroissante planifiée, volontaire et salutaire. Et si nous imaginons le quotidien de citoyen.ne.s dans ce futur proche ? 


PARIS – Octobre 2026

Lundi

Je suis impatient de revoir Marc: nous ne nous sommes pas revus depuis son départ pour Bangkok il y a 10 ans. Même si on échange souvent sur les réseaux sociaux, j’ai aussi un peu peur de nos retrouvailles: Marc est un entrepreneur à succès, sa vie est très différente de la mienne – avons nous toujours les mêmes affinités ?A l’arrivée à la gare du Nord (les avions ne viennent plus jusqu’à Paris, il faut changer à Lesquin), nous prenons les vélos partages (avec remorque pour sa valise), et je suis vite rassuré. Il me dit être très curieux de voir par lui-même tout ce qu’il a pu lire et entendre sur les changements en France depuis 2022.

Mardi 

On se réveille avec la pluie : il pleut des cordes. Marc qui pensait trouver un printemps rayonnant à Paris se plaint. Je lui explique que Paris sous la pluie, ça a un côté magique, surtout quand on est bien équipé ! Je lui prête des vêtements pour aller faire du vélo par temps de pluie. Il découvre le système de vélo électrique partagé au niveau de la copropriété, il adore. Lui qui n’est pas très vélo à la base reconnaît à quel point ces bécanes sont de véritables bolides. Il découvre le Paris sans voiture et ses 10.000 pistes cyclables. C’est un choc : la dernière fois qu’il était à Paris, c’était avant le COVID, à l’époque où rouler en vélo pouvait te coûter la vie. Il tenait absolument à faire le tour du périph en vélo. J’ai accepté, mais lui ai dit qu’il fallait absolument qu’on soit de retour pour midi car Evelyne anime sa séance de sport quotidienne dans la copro. Il a accepté. De retour à midi pile, juste le temps de garer le vélo dans le parking de la copro, on rejoint les 15 voisins qui se réunissent quotidiennement pour la séance de sport. Elle a lieu dans l’espace commun de l’immeuble, celui que l’on trouve à présent au 1er étage de tous les immeubles haussmanniens de Paris. Avant c’était un appartement, maintenant c’est un espace que tout le monde partage : un lieu de vie, une buvette, une salle polyvalente, salle pour les enfants : c’est multifonction et en libre accès via un agenda partagé

Mercredi

Bon, c’est la cata … tout est trempé dans l’appart. Il y a eu un coup de vent très très violent pendant la nuit, et les tuiles se sont envolées. Manque de bol, c’était pile au moment où l’averse avait atteint son paroxysme. Je fais le tour, on ne va pas pouvoir rester là. Les voisins sont déjà là, on regarde un peu ce qui a été amoché. Un petit coup d’œil dehors … le reste ça va. La ville est humide, mais elle tient bonL’évacuation des eaux dans les rues se fait sans trop de difficultés, on a eu raison d’enlever un peu de béton et d’anticiper en faisant des noues urbaines, du coup l’eau stagne encore un peu mais elle va s’infiltrer petit à petit. Vite, vite je descends quelques étages, et je jette un coup d’œil au cahier de l’immeuble … Je vois qu’Evelyne a justement indiqué qu’elle avait un peu de place pour recevoir ces jours-ci. Je prends Marc sous le bras, et on va sonner chez elle… on fait un point rapide, et on s’installe temporairement. Il faut savoir s’adapter

Samedi

Il est midi, je propose à Marc de rejoindre l’apéro hebdomadaire du quartier. Il fait beau ce samedi ! Et les jours de beaux temps, l’apéro a lieu sur le rooftop de l’immeuble d’en face. Marc tombe des nues en découvrant ce rooftop végétalisé. Il me dit « c’est quand même dingue qu’on n’ait jamais pensé avant à exploiter les toits de Paris pour en faire des lieux de voisinage et qui plus est des potagers ! Marc tombe une seconde fois des nues en découvrant cette foule de gens sympas tous issus du quartier ! Il revoit des têtes familières aperçues au sport le mardi. Il prend un verre de bière fabriqué par Tom le voisin du second et se met à discuter avec un inconnu. Je sens qu’il est à l’aise.

Il est l’heure de partir, mais Marc nous dit, à Evelyne et moi: « Merci à vous deux ! Je me suis senti tellement bien toute cette semaine ! Avant de venir j’avais lu tellement de critiques sur ce qu’est devenue la France, mais là maintenant je suis convaincu que c’est la solution, et c’est comme ça que je veux vivre maintenant. Merci !  » J’en ai presque mal aux joues tellement je souris…