13 Sep Chouette, Maman s’est cassée la cheville !
Récit imaginé par Inès Quirouard-Frileuse, Elodie Merlot, Géraldine Amblard Gross, Domitille Lamblin et facilité par Mathilde Guyard dans le cadre l’atelier futurs proches réalisé le 13 septembre à la Basse Cour à Rennes.
Thème de l’atelier : Et si en 2035 la voiture individuelle était devenue obsolète ?
Un lundi matin de novembre 2035, école Milan Kundera à Rennes…
Oh la la les copains depuis que maman s’est cassé la cheville, ma vie est bouleversée!!
C’est trop nul parce qu’elle ne peut plus pédaler et du coup, le vélo cargo, aux oubliettes. En plus, elle doit rester quelques jours à la maison histoire de reprendre des forces. Elle a fait une chute de cascadeuse en trail. Déjà, c’est pas rigolo pour elle et en plus, j’étais triste parce que moi, j’aime trop quand on partage les trajets avec maman rien que nous deux.
Je ne peux pas venir ici à pied, j’habite à Saint Gilles et c’est bien trop loin. Mais maman, c’est une championne, c’est pas un pied dans le pâté qui l’empêche de trouver des solutions. Elle est allée voir un voisin. Il s’appelle Pierre mon voisin, il n’a pas d’enfants avec qui je peux jouer mais il est très sympa quand même. Et il lui a dit: « Soizic, ne t’inquiète pas, c’est avec plaisir que j’emmène Robin à cheval en allant bosser. C’est un tout petit détour ». Vous vous rendez compte, moi j’avais jamais fait de cheval et là ce matin, tranquille, je suis venu à l’école à cheval. Il est beau son cheval, il s’appelle Prince et franchement, je comprends pourquoi. On a d’abord pris le temps de le brosser et lui donner à manger, ensuite on a posé une double selle – c’est fait exprès pour pouvoir être à 2 sur le cheval – et ensuite, on est parti, à travers champs puis le long des quais de la vilaine. Quel moment magique ! J’ai même vu une biche, des petits lapins et tout et tout. C’était bien parce que même s’il faisait froid, le cheval, lui, avait bien chaud et nous réchauffait. Quel Prince! Plus tard, c’est décidé, moi aussi je me déplacerai à cheval!
…mais, que je vous raconte dans le détail :
Alors voilà, hier après-midi, une ambulance-tram a ramené ma maman à la maison parce qu’elle a eu un accident à sa course de trail. Elle a glissé sur une vieille flaque d’huile d’une ancienne route à voitures qui n’avait pas été réaménagée. Du coup, elle est rentrée à la maison avec un gros plâtre en chanvre et des béquilles en bambou hyper classes ! Elle n’a pas pu faire la cuisine, alors c’est moi qui nous ai fait des sandwichs beurre-confiture (maman elle est trop gourmande) et ça l’a fait sourire.
Mais les mercredis, elle m’emmène à mon entraînement de foot au Stade Rennais. Elle est super organisée ma mère parce qu’elle est infirmière. Elle utilise tous les types de transports possibles pour soigner ses patients à Rennes ou dans les villes autour de Saint-Gilles. En général, après mon histoire du soir, elle réserve et sélectionne ses trajets pour optimiser sa journée : vélo cargo, co-voiturage, lignes de tram et de navettes fluviales et même des trajets en charrette express déployée dans le quartier ouest de Rennes.
Mais comme elle n’a pas pu réserver ses trajets, je ne sais pas comment je vais faire ? En plus, cet entraînement, il est important pour moi car il est juste avant le match contre les équipes juniors de Lyon !
Un mardi matin de novembre 2035…
Du coup, avec maman, pour le foot demain, on a réfléchi. Le tramway de Saint-Gilles à Rennes, c’est pas bien, parce que le tramway arrive à République, et après c’est trop compliqué pour moi de trouver le bus qui va au stade. Je ne connais pas bien la place République, et il y a trop de monde, ça me fait trop peur. Du coup, on a décidé que j’allais prendre l’Apibateau. Comme c’est gratuit pour les enfants, en plus. En fait, il y a un arrêt à la gare fluviale du Rheu, et en quinze minutes, tu arrives au stade rennais, juste au niveau de l’écluse.
Le problème le plus compliqué, c’est pour arriver au Rheu depuis Saint-Gilles, parce que les bus ne sont pas très nombreux et les horaires ça ne colle pas bien avec le foot. Mais hier, comme maman ne pouvait pas marcher, c’est moi qui suis allé chercher les légumes à l’Amap. C’est sur la place de la Mairie, à dix minutes à pied depuis la maison. Et en chemin, j’ai discuté avec le père de Maryem, qui allait aussi à l’Amap. Et c’est lui qui a eu l’idée. Il m’a dit qu’on n’avait qu’à utiliser l’appli QuickRoad. A tous les coups, il y aura bien quelqu’un de Saint-Gilles qui ira au Rheu vers 13h30, et qui pourra m’emmener jusqu’à la gare fluviale. Avec maman, on a regardé, on peut cocher le mode de transport que l’on veut bien prendre. On va se connecter ce soir et on va mettre « covoiturage », « tandem », « voiturette à pédale », « vélo-cargo ». On verra bien, mais le père de Maryem a dit qu’il ne fallait pas s’inquiéter, il y aurait forcément des propositions.
En fait, c’est cool, j’ai jamais fait ça ! Ça va montrer à maman que je suis un grand et que je peux aller au foot tout seul, maintenant !
Un jeudi matin de novembre 2035…
Ça m’a étonné, je me pensais tout seul dans ce village, loin de mes amis et de Rennes mais nous sommes beaucoup en fait ! Encore un autre voisin a été trop chouette et m’a amené à l’école! Je ne le connaissais pas celui-là avant que maman se soit cassé le pied mais en fait c’est un héros ! Il m’a raconté qu’il récupérait nos déchets pour les transformer en plein de choses comme mes cahiers ou encore en trottinette en plastique recyclé nouvelle génération. J’ai découvert que son enfant de 2 ans de moins que moi vient de la même école, je me suis fait un nouveau copain.
Et il n’y a pas que ça, vous ne savez pas quoi ? J’ai pris le bateau pour aller au foot car maman ne pouvait pas m’amener, donc nous avons fait appel à des gens du village sur l’application quick road. Il y avait 3 adultes qui ont fait le tour du quartier pour récupérer tous les enfants qui comme moi devaient se rendre au Rheu en cyclobus. On pédalait tous ensemble, c’était trop drôle. Puis nous avons pris le bateau avec un des trois adultes, les autres nous ont expliqué qu’ils devaient retourner travailler, c’est pas drôle , moi je voulais qu’ils viennent avec nous pour nous encourager c’est dommage.
Au retour du foot, c’était le boulanger de mon village qui m’a récupéré avec 2 copains. Ça a bien aidé maman finalement aujourd’hui. J’ai rencontré plein de nouvelles personnes et mon ancienne maîtresse de maternelle a proposé à maman de me récupérer de l’école avec son fils pour qu’on rentre tous ensemble en bus une prochaine fois. Ça m’a fait bizarre, mais maman était contente d’avoir autant de monde pour l’aider.
On était tous seuls et maintenant on est un village! Il faudrait que maman se casse le pied plus souvent !