06 Mai Aquasolarpunk city
Récit imaginé par Miko Kontente, Séverine Larrouy, Alexis Blum, Cynthia Bagousse et facilité par Lucien Schiltz dans le cadre l’atelier futurs proches réalisé le 6 mai 2021.
Thème de l’atelier: et si nous imaginions des cours de futur à côté des cours d’histoire à l’école pour libérer les imaginaires des enfants ?
Ça y est ! La rentrée des classes est arrivée ! Un réveil un peu compliqué a ponctué ce début de journée après un retour tardif à Aquasolarpunk city hier !
Nous voilà maintenant avec mon père dans mon nouveau lycée, abrité sous une pergola naturelle. Nous faisons face à un chêne centenaire absolument magnifique ! Je le trouve tellement élégant et majestueux ! Il me donne l’impression d’abriter en lui autant le féminin que le masculin…un peu comme moi ! Pour mon père, il représente la transmission et l’apport des cours du futur au monde de l’enseignement. Ah ! Les cours du futur ! Moi, ce que j’en pense, c’est qu’ils nous prennent bien la tête avec !!! Regardez-le ! Il est complètement surexcité à l’idée que je prenne cette matière ! Habillé en batman fluo, il ne cesse de s’extasier avec d’autres parents de sa génération devant la réussite de leur combat ! Alors que moi, je m’en fous ! Oui, c’est vrai que de ne pas se soumettre à des sonneries et des grilles pour être contrôlé semble appréciable à les écouter ! Tout autant que de disposer de grands espaces verdoyants et colorés autour de nous pendant nos journées de cours ! Mais sérieusement, quel est l’intérêt de continuer ? Ils s’approprient la création et la réussite de ces cours en nous disant sans cesse à quel point ils ont su développer l’imaginaire de chacun et rendre le monde meilleur ! À les entendre, tout a déjà été pensé ! Alors qu’ils nous laissent tranquilles ! Il n’y a qu’à écouter nos échanges devant la liste des matières à choisir pour cette année pour saisir nos désaccords:
« Regarde Pragmito les cours des futurs! »
« Arrête un peu avec ce cours Papa ! C’est tellement inutile et ringard ! Franchement, j’ai mieux à faire de mon temps que de rester à écouter ces conneries ! »
« Des conneries ?! Non mais tu rigoles ou quoi ?!? Tu laisses libre cours à ton imagination seul ou en groupe ! C’est un temps uniquement dédié à l’ouverture ! Inscris toi, ça va te plaire ! »
« C’est bien ce que j’ai dit, c’est I-N-U-T-I-L-E ! Tu me parles d’imagination mais vous, vous avez déjà tout pensé pour nous ! Nous n’avons plus rien à imaginer ! Vous vous êtes accaparé tous les imaginaires possibles ! »
« Je t’arrête tout de suite Pragmito ! Tu ne sais pas de quoi tu parles. N’imagine pas que cela ait été facile pour nous ! C’était nouveau et, justement, tout était à imaginer alors que nous étions enfermés dans des schémas de pensée très obtus ! Donc, pour nous aussi, cela a été dur mais dans une autre mesure ! Déconstruire n’est pas plus difficile que construire ! La difficulté est partout ! »
« Oui, je sais, tu me le répètes sans cesse ! Mais du coup, quoi ? On doit se plier à votre exigence d’imaginer tout le temps ?! Est-ce que ce n’est pas à nous de choisir ce que nous voulons pour nous aujourd’hui ?! »
Voilà, à quoi ressemblaient nos échanges ! Il était vraiment temps que mon grand-père arrive !
Romain arriva enfin ! Tout le monde dans la famille l’appelait Papy en raison de son âge. Mais pour moi, c’était Romain. Il a un prénom, non ? Et puis j’ai l’impression que cela lui plaît !
“Alors ces cours ? “lance-t-il avant même de nous avoir rejoint.
“Penses-tu, rétorque le paternel, il râle encore sur les cours du futur !”
“Je le comprends le loupio !” dit Romain. “De mon temps, on n’avait pas de cours de futur et on s’en tirait très bien.”
Anastasio n’en revenait pas: “Sérieusement , tu t’entends parler ? T’es comme ton petit-fils ! À croire que vous faites abstraction des bienfaits que ces cours nous apportent à tous !”
“C’est peut-être bien ça le problème Papa ! Ce que cela apporte uniquement aux hommes !”
“Ton fils a raison Anastasio ! Ces cours sont nés d’une nécessité de faire autrement. Quand j’avais son âge, c’était juste n’importe quoi: entre les crises écologiques, sanitaires, sociales, et j’en passe, on ne croyait plus en rien. C’est pour cette raison, que nous avons eu l’idée de réenchanter les imaginaires ! Notre avenir était sclérosé. Et regarde, ce que c’est devenu. Les travers de la société que j’ai connu sont revenus s’immiscer en excluant à nouveau la Différence qui construit notre enrichissement mutuel. Il est vrai que plein de choses ont changé en bien. Qui aurait pu deviner que s’habiller en un batman fluo puisse devenir une tenue vestimentaire normale et quotidienne ?! Certainement, pas moi ! Qui aurait pu supposer que nos enseignements deviendraient si agréables ? Vu d’où on partait, ce n’était pas gagné ! Mais Anastasio, reconnais que des dérives ont surgi. Et je peux comprendre le manque d’engouement de Pragmito.”
Romain et Pragmito échangèrent longuement pendant qu’Anastasio s’amusait à des parties d’imaginaire qui se déroulaient le long de la rivière entourant le lycée. Pragmito pouvait avoir honte de son père mais il fallait lui reconnaître cette insouciance, source de créativité. À tout bien considérer, peut-être que ce n’était pas tant les cours du futur le problème, mais le fait que petit-à-petit, ils étaient devenus excluant. C’était certainement cela qui le contrariait. Lui, ressentait profondément sa part féminine et ces cours ne lui permettaient pas de pouvoir l’exprimer. Peut-être que son combat serait celui de transformer les imaginaires en un espace de co-construction de nouveau inclusive. Un cours du futur où il serait possible de faire s’embrasser dans un même lieu la pluralité dans sa complexité: un univers où les différences seraient source de créativité et de tolérance.